Laurent
Guillaume nous entraîne dans son nouveau roman au Viet Nam à Saïgon en 1953, en
pleine guerre d’Indochine. La France protège son empire en soutenant les
Annamites contre l’invasion communiste (le Vietminh, la Chine). Il fait une
description très précise de l’ambiance (alliés des Français, des espions de
tous les pays : USA, Angleterre, Chine, Russie, Japon, Vietminhs ;
des tueurs à gages, des sectes, des mafieux corses, des trafiquants de toute
sorte (opium).
Laurent
Guillaume s’appuie sur des faits historiques (CF Pierre Lemaître) en utilisant
en grande partie le vécu de personnages ayant existé. En fait, il fait rejouer
à ses personnages l’avant-veille de la grande bataille de Dien Bien Phu qui vit
la défaite de l’empire français et la décolonisation de l’Indochine. Ce qui
donne une force extraordinaire de réalisme et de crédibilité à ce livre.
Une
des dames de guerre se nomme Elisabeth Côle. Elle est journaliste de mode à
Life Magazine à New-York. Très mondaine, mariée et riche, elle ne fréquente que
la bonne société américaine et vit dans le luxe. Elle est en outre une
excellente photographe et rêve de devenir photographe de guerre.
Au
cours d’une réunion au Life Magazine, est évoquée la mort accidentelle de
Robert Kocacs, victime d’une embuscade vietminh au cours d’une expédition sur
les Hauts plateaux du Nord du Laos. Il suivait une colonne militaire française
et Méo en tant que correspondant de guerre.
Elisabeth
Côle se porte volontaire pour le remplacer ; seule candidate, elle obtient
le poste. Persuadée que Kovacs a été assassiné, elle veut mener une enquête à
partir du lieu où il a disparu et découvrir ce qu’il avait flairé au point de
se faire éliminer.
Elle
arrive rapidement à Saïgon où l’attend Graham Fowler, un Anglais. Elle ne
connait personne et découvre un sac de nœuds en Indochine où chacun en profite,
ruse, manipule, s’amuse, magouille sans scrupule, tue sans savoir pourquoi, il
faut survivre.
Inexpérimentée,
elle est aidée, à son insu par de nombreux personnages, hauts en couleurs
(légionnaires français, CIA, Japonais, Annamites) pour suivre les traces de
Kovacs. Sa tête est mise à prix, inconsciente, elle parle beaucoup et sème le
désordre.
Elle
est entraînée dans « l’opération Castor » sur les hauts plateaux du
Laos par les baroudeurs français, les Méos, peuple de montagne sanguinaire et impitoyable
qu’elle a obligés à l’emmener. En insécurité permanente, elle découvre au fil
de son périple à travers l’Indochine que chacun défend plus les moyens de
financement, que les victimes de la guerre, et surtout que la France est à bout
de souffle sur cette affaire. Elle prend conscience de l’horreur des combats,
ce qui ne correspond pas à sa notion de l’honneur, jusqu’à ce que Brémond,
officier français, lui déclare « cessez de voir de l’honneur dans la
guerre. C’est l’endroit qui en est le plus dépourvu ».
Chacun
essaie par tous les moyens malhonnêtes de survivre, de s’enrichir en profitant
de systèmes échappant à tout contrôle (trafics opium et piastres).
A
travers son héroïne, Elisabeth Côle, Laurent Guillaume rend hommage à toutes
les femmes reporters de guerre qui risquent tant pour nous informer en laissant
souvent de côté leur féminité.
Pour
les amateurs de romans historiques, d’aventures et d’espionnage. Roman très
documenté et passionnant.